Au sein de la fédération BTP Rhône et Métropole, vingt-six chambres syndicales réparties sur cinq sections, et quatre chambres territoriales, œuvrent au plus près des adhérents. Nous avons choisi de diriger le projecteur sur chacune de ces chambres en posant sensiblement les mêmes questions à chacun des présidents. Laurent Coquard, directeur des bureaux d’études des entreprises du groupe PMP (Soterly ; Beylat TP ; Revaga (recyclage) ; Empreintes de Jardin (espaces verts), est le président de la chambre « Désamiantage » de la section Filière construction.
Quel est le champ de compétences de la chambre « Désamiantage » ?
Comme son nom l’indique c’est le désamiantage des bâtiments, un métier très contraint par la réglementation qui nécessite une certification (1552). Nous sommes un peu plus de vingt adhérents, avec des entreprises qui vont de la petite PME au grand groupe national.
Vous devez suivre des process très spécifiques ?
En effet, et former notre personnel en « sous-section 3 », qui est une formation assez lourde. L’entreprise doit également être certifiée, avec un audit-siège tous les ans, et des audits-surprise sur les chantiers.
Quels sont vos donneurs d’ordre ?
Des collectivités locales, pour des travaux dans des bâtiments publics comme des écoles, des promoteurs qui ont des bâtiments à démolir avant de construire, et des industriels pour de la rénovation. Cela peut être aussi des particuliers.
Question de néophyte, que ferez-vous quand vous aurez tout désamianté ?
Nous avons du travail pour encore plusieurs dizaines d’années, voire plus encore ! D’autant que l’on se rend compte que d’autres produits qui ne sont pas classés comme l’amiante (laine de roche, laine de verre, silice, PVC…) posent questions. Peut-être qu’un jour la réglementation concernera ces autres matériaux, les entreprises de désamiantage auront alors les process pour gérer leur élimination.
Pour le premier confinement vous vous êtes tous arrêtés ?
Parmi les adhérents oui. Le temps que les protocoles soient établis, ensuite les chantiers ont repris petit à petit, le temps de mettre en place les nouveaux process, les nouvelles installations, notamment pour les temps de repos, puisque l’amiante c’est deux heures de travail – une demi-heure de repos, avec douche obligatoire, et pendant ces temps de repos nos salariés ne sont plus protégés par leurs équipements.
Quel est le bilan de l’année 2020 pour votre secteur d’activité en termes d’exploitation ?
C’est un gros mois, entre 10 et 15% de chiffre d’affaires perdu. Cela aurait pu être pire, heureusement, nous avons eu des rattrapages de retards en fin d’année.
Comment débutez-vous 2021 ? Vous travaillez à la fois avec la commande publique, qui est en attente, et les promoteurs dont l’activité est en berne.
L’année commence avec très peu de visibilité. Côté commande publique, on souffre de décalage des dossiers, de lenteur dans les décisions, dus à la fois à la mise en place d’un nouvel exécutif à la Métropole, mais aussi à la multiplication du télétravail qui ralentit les signatures… Il y a des mises en sommeil, des annulations de certains projets. On entend la volonté des élus de donner du travail, mais pour l’instant nous n’avons pas de visibilité. Les promoteurs, eux, sont très inquiets pour l’avenir puisqu’une réduction des logements produits est évoquée. Ils n’ont pas plus de visibilité que nous.
Votre profession va-t-elle bénéficier des plans de rénovation thermique de l’État et de la Métropole ?
On l’espère. Elle est annoncée, nous attendons les appels d’offres.
Dans ce contexte vous avez tout de même un peu de travail ?
Une des caractéristiques du désamiantage est de devoir établir un plan de retrait à destination de l’inspection du travail et autres organismes qui ont un mois pour leur retour. Nous sommes donc bloqués un mois avant les travaux. Dans les années confortables nous travaillions avec neuf mois de visibilité, aujourd’hui nous avons deux mois, c’est-à-dire un mois de travail devant nous. Cela engendre un peu de stress, et entraîne une chute des prix.
En période de crise, nous avons souvent la double peine pour le CA : la baisse du volume d’activité qui vient se combiner avec la chute des prix.
Êtes-vous malgré tout optimiste pour cette année ?
Nous ne sommes pas dans le cas des restaurateurs, nous ne sommes pas une profession en crise Covid, nous avons appris à travailler avec, à le gérer, nous sommes plus marqués par la baisse d’activité économique post année électorale. Quand nous écoutons les élus, nous sommes optimistes, quand on constate la réalité des choses, c’est plus difficile. Nous allons juste devoir nous structurer pour passer cette période difficile, qui je l’espère s’arrêtera avec 2021.
Tout se jouera dans les six prochains mois ?
Voilà. Je dirais même : il faut que cela se joue dans les six prochains mois, sinon cela sera très dur.
©Photo de Laurent Coquard par Christophe Pouget.
Une interview à retrouver dans le JBTP du 4 mars 2021