La fédération BTP Rhône et Métropole a initié pour le mois de la Femme une grande série d’interviewes de femmes engagées dans les métiers du Bâtiment ou des Travaux Publics.
Nous avons décidé de prolonger ce mois de mars puisque c’était également l’occasion de (re)demander aux adhérentes de la fédération comment elles se situent et s’organisent dans ce monde où le féminin se conjugue aujourd’hui sur tous les modes.
Guénaële Chauvel est la gérante de Blanchard et Blazquez, une entreprise de plomberie et chauffage d’une quarantaine de salariés. Elle est adhérente au groupe Femmes, à la chambre GCP, participe à plusieurs commissions, elle est enfin membre du conseil d’administration de la fédération.
Comment êtes-vous devenue gérante de Blanchard et Blazquez ?
Mon mari Frédéric a racheté l’entreprise en mai 2010. Je l’ai rejoint en septembre car il y avait le feu : contrôle fiscal, visite de l’inspection du travail, contrôle Urssaf, dossier Qualibat à renouveler… Tout est arrivé en même temps. De 2015 à 2016 j’ai suivi pendant quinze mois, la formation de l’École supérieure des jeunes dirigeants du bâtiment (ESJDB), où j’ai pu balayer toutes les problématiques de l’entreprise de A à Z. J’ai ainsi acquis des compétences et une vision globale de l’entreprise. A la suite de quoi Frédéric a trouvé que j’étais la personne la plus indiquée pour prendre la gérance de l’entreprise.
Quelle est l’activité de votre entreprise, son savoir-faire ?
La plomberie principalement et un peu de chauffage.
Quels sont vos clients ?
Nous travaillons beaucoup en sous-traitance avec de grands groupes sur des chantiers en tertiaire. Nous faisons aussi bien du neuf que de la rénovation et avons une petite activité avec les particuliers.
Combien avez-vous de salariés ?
L’histoire de l’entreprise a été marquée par un plan de sauvegarde de 2012 jusqu’à 2021, et donc cela a été fluctuant. Quand je suis arrivée dans l’entreprise nous étions 42. Avec le plan nous sommes descendus à 17. Et aujourd’hui nous sommes remontés à 40. Nous sommes en pleine expansion depuis deux ans.
Comment vous en êtes-vous sortis ?
Par une gestion drastique, en utilisant tous les moyens à notre portée, comme les délégations de paiement, les demande d’acomptes… Nous avons eu également la chance d’avoir des fournisseurs qui ont été compréhensifs, certains nous ont même soutenu. Notre philosophie a été – et demeure – d’être transparent avec tout le monde, les fournisseurs en premier lieu, ainsi personne n’a été pris par surprise. C’est toujours très bénéfique de communiquer et d’être transparent.
Commercialement vous avez changé vos façons de faire ?
Oui. Dans un contexte de transmission d’entreprise, puisque mon époux et moi-même prévoyons notre départ pour 2024. Pendant ces dix dernières années nous avons intégré nos deux fils. L’ainé Alexandre développe la partie commerciale et Clément s’occupe de la production. Nous avons intégré également notre belle-fille au poste de RH en 2019. Et nous avons étoffé notre service commercial avec deux personnes dédiées à l’étude et au chiffrage ce qui nous permet aujourd’hui d’être mieux armés pour nous positionner plus vite. Avec Alexandre et son équipe nous avons dirigé nos forces sur les grands comptes avec de bons résultats.
Comment faites-vous pour recruter ?
Nous ouvrons l’entreprise aux stagiaires majeurs depuis longtemps. Cela nous permet de jauger la mentalité et la motivation des jeunes, afin qu’ils correspondent à notre savoir-être. Nous nous intéressons aussi beaucoup aux personnes en reconversion professionnelle, et aux réfugiés, avec des parcours souvent extraordinaires. Ce sont des gens très motivés qui vous rendent mille fois ce que vous leur donnez et qui ont un savoir-vivre et être incroyables. Et enfin l’apprentissage qui a toujours prévalu dans l’entreprise.
Quelle est la part des femmes ?
Quatre femmes dans les bureaux, et une sur le terrain depuis l’an passé. On progresse !
Est-ce que la plomberie est prise dans le tourbillon des hausses et de la pénurie de matériaux ?
Ça explose ! Tout augmente, même la faïence. Nous avons rejoint la problématique de tout le Bâtiment, un peu en décalage…
A quoi sont dues ces hausses selon vous ?
Je suis certaine hélas que les industriels et fabricants utilisent la crise pour procéder à des augmentations pas toujours justifiées. Quand on connaît le résultat net de certains d’entre eux il n’est pas normal que la variable d’ajustement se fasse uniquement sur les entreprises du bâtiment. Ils pourraient faire tampon et baisser un peu leurs marges, mais ne le font pas. Nous, nous sommes contraints de le faire parce que nous sommes en bout de chaîne. De leur côté les clients font en majorité la sourde oreille. Nous sommes « pressés » entre les deux.
Qu’est-ce qu’il faudrait faire ?
Il me semble que c’est un problème politique. Le gouvernement a menacé de lancer des contrôles sur les hausses abusives, mais cela me paraît peu probable. Il faut absolument que nous puissions au moins réévaluer nos prix sur les marchés privés.