Didier Lenoir : « Il faut qu’on aille bon train pour la planète »

Les deux premières « Lettre E » comme Écocitoyenneté, Écologie ou encore Environnement, ont connu un véritable succès d’audience. L’initiative de la fédération BTP Rhône et Métropole de vouloir partager avec les acteurs économiques et institutionnels ses engagements, ses interrogations, mais aussi ses solutions sur tous les sujets liés à l’économie circulaire a largement convaincu. C’est la raison pour laquelle nous avons choisi de faire profiter les lecteurs du Journal du BTP de la variété et la qualité des intervenants en reprenant ici l’essentiel de leurs interviewes.

La « Lettre E » d’avril-mai a choisi pour thème « Les déchets : recyclage et économie circulaire », véritable sujet d’actualité marqué par les enjeux des applications de la loi AGEC (loi relative à la lutte contre le gaspillage et pour l’économie circulaire). Didier Lenoir intervenait dans ce deuxième numéro.

Didier Lenoir dirige « Lenoir Métallerie », une entreprise d’une centaine de personnes spécialisée dans la serrurerie acier, la menuiserie alu et les façades, dont le siège est à Villeurbanne. Elle possède son propre bureau d’études, ses ateliers et dispose de ses propres équipes de pose. Il est aussi le président de « Construire Pro ».

Comment une entreprise du Bâtiment gèret-elle ses déchets ?

Au sein de l’entreprise, nous avons des bennes pour récupérer le vitrage, l’acier, l’aluminium, l’acier inoxydable, le DIB (déchet industriel banal), le bois, les déchets dangereux… Nous sommes organisés pour et donc nous valorisons une grande partie de nos déchets. Nous envoyons aussi au recyclage nos documents papiers, les archives, avec lesquels on fait des balles.

Où envoyez-vous les contenus de ces bennes ?

Nous avons différents prestataires qui soit les reprennent gratuitement, soit nous rémunèrent pour les valoriser. Cela dit, nous avons la chance de travailler les métaux qui sont recyclables.

Comment faites-vous pour poser autant de bennes autour de vos chantiers, notamment en ville ?

Les bennes restent à l’entreprise, nos compagnons disposent de Big Bag sur place.

Qu’est-ce que vous ne pouvez pas valoriser et qu’en faites-vous ?

Des petits éléments de plastique comme des cales, et des déchets un peu à la marge comme la poussière, ça peut aussi être des emballages… Ils sont repris par un prestataire qui les emmène en enfouissement.

Tenir un chantier propre, gérer ses déchets, cela a donc un coût, vous avez dû investir ?

Oui, mais nous nous y retrouvons. Nous nous sommes organisés parce que nous sommes une profession qui travaille des matériaux à forte valeur ajouté. Nous essayons donc de ne pas gaspiller. Sinon, la propreté sur un chantier, c’est comme la sécurité, si c’est bien anticipé, ça ne coûte pas plus cher. Et si on a formé son personnel, si on lui a donné les moyens de travailler en générant un minimum de déchets et en étant capable de collecter au fur et à mesure les déchets produits dans les phases de fabrication pour les entreprises qui ont des ateliers, où dans les phases de pose pour la plupart des corps d’état, c’est une chose qui se fait naturellement et qui ne va pas grever le coût. Cela va contribuer à l’image du secteur, à la propreté des espaces et à l’hygiène, et donc à la sécurité et à la qualité de l’ouvrage.

Est-ce que la réglementation va trop vite selon vous ? On vient de passer de 5 à 7 flux, on vient de repousser la REP 2020 d’un an…

Je pense qu’il faut qu’on aille bon train pour la planète. Après tout cela se fait juste dans un contexte où nos marges sont très érodées dans le Bâtiment, où nous avons du mal à vendre, du mal à acheter, du mal à trouver du personnel… donc on passe beaucoup d’énergie sur d’autres sujets alors que la production de déchets doit être une priorité.

Vous êtes le président de « Construire Pro », quelle a été votre action sur la gestion des déchets ?

Construire pro est le bras armé de BTP Rhône pour l’expérimention et le développement d’un certain nombre de bonnes pratiques dans le Bâtiment. Il y a une quinzaine d’années, on a constaté le piteux état de nos chantiers en matière de propreté et de gestion des déchets, on a donc mis au point un dispositif – « Construire Propre » – qui permet une meilleure tenue des chantiers. Il repose à la fois sur l’engagement du maitre d’ouvrage, l’intervention du maitre d’exécution, et la responsabilité des entreprises parties prenantes sur le chantier autour de la tenue de leur outil de travail, la minimisation des déchets à la source, et leur évacuation. C’est le sens de l’histoire. Il s’agit de donner la meilleure image possible de nos chantiers au grand public, aux jeunes qui vont rejoindre notre métier, et c’est aussi répondre aussi aux problématiques de sécurité, et de qualité.

« Construire Pro » vient de tester la pertinence de l’animateur de chantier. De quoi s’agit-il ?

L’animateur effectue au quotidien sur son chantier une synthèse des trois actions essentielles proposées par « Construire Pro » : la tenue du chantier et la gestion des déchets ; la gestion des flux de chantier, approvisionnements, livraisons et autres ; et « cartepro » notre outil destiné à lutter contre le travail clandestin. Avant, nous proposions aux maîtres d’ouvrage chacune de ces prestations avec obligation de moyens et des résultats significatifs, mais il manquait la garantie du résultat. Nous avons donc imaginé ce nouveau métier dont la mission est de contrôler que tout se passe bien sur le chantier. On va y ajouter la sécurité, l’hygiène et l’environnement.