Valérie-Anne Charroin vient d’être nommée présidente du groupe Femmes dirigeantes de la fédération BTP Rhône. Elle est également membre du comité de pilotage de la Maison des Apprentis. DAF de l’entreprise Charroin Toitures qu’elle dirige avec son mari Vincent, (17 salariés, Vourles), elle a débuté le métier il y a 27 ans comme apprentie.
Vous venez d’être nommée présidente du groupe Femmes dirigeantes dont vous étiez la vice-présidente. Quel est votre plan de mandat ?
Mon plan de mandat est de répondre au mieux aux besoins des femmes en matière de fiscalité, de nouvelles réglementations, de législation, dans un contexte en perpétuel mouvement. Notre groupe est un vrai groupe « ressource », très utile à nos entreprises. C’est aussi une véritable bulle d’air où nous partageons toutes les mêmes problématiques, que ce soit au niveau administratif, avec le personnel, les fournisseurs… Vivre les mêmes réalités rapproche et permet de se sentir moins seule en étant épaulée, tout en trouvant des solutions ensemble.
Ce groupe est très actif, le nouveau président Norbert Fontanel vous a-t-il donné une feuille de route ?
Ce groupe est effectivement très actif. Nous sommes cent-vingt femmes adhérentes avec une présence forte à chaque rencontre. Des chiffres en croissance chaque année, preuve que chacune d’entre nous trouve sa place, des réponses et du soutien dans ses attentes. Pour l’instant, Norbert Fontanel m’a donné une recommandation : ne pas oublier d’avoir des moments de convivialité. Je l’ai rassuré sur ce point, même si dans le groupe nous abordons tous types de sujets, parfois fastidieux, laborieux et presque anxiogènes pour les cheffes d’entreprise que nous sommes.
Alors en effet face à la conjoncture actuelle, nous trouvons notre force dans ces moments de décompression. Le groupe Femmes est à la fois un groupe ressource et, évidemment, un groupe convivial !
De plus en plus de femmes dirigent des entreprises, sont chargées d’affaires ou conducteurs de travaux. Pourquoi n’est-ce pas encore le cas sur les chantiers ?
La place de la femme a beaucoup évolué depuis l’époque de nos grand-mères et de nos mères et nous avons déjà abattu des montagnes. Mais la partie est loin d’être gagnée. Je pense – sans être féministe – qu’il y a encore beaucoup de chemin pour que la femme soit considérée à sa juste valeur dans le monde du travail. Elles manquent sur les chantiers, c’est une évidence, et nous aimerions qu’elles rejoignent nos équipes. Pour cela, un travail sociétal est à réaliser en amont, par l’éducation de nos enfants, de nos garçons et de nos filles ; leur proposer les métiers du Bâtiment et des Travaux Publics dès le collège, et leur faire comprendre que nos métiers ont une vraie force, un savoir, et une fierté de créer, de construire des ouvrages eux-mêmes. Bref, changer l’image vieillotte du BTP.
La technologie, les exosquelettes par exemple, peuvent-ils favoriser l’arrivée des femmes dans le BTP ?
Oui, pourquoi pas, nous sommes confrontés au quotidien à la pénibilité du travail et nous faisons tout pour accompagner, diminuer le poids des charges, mettre à disposition des outils pour le confort de nos compagnons sur les chantiers. Cela dit, la technologie s’est déjà installée dans beaucoup de nos entreprises et cela n’a pas vraiment fait exploser le nombre de femmes. Il faut continuer à mettre en place ce type d’outillage novateur mais surtout changer les mentalités, accueillir les femmes, les sensibiliser pour qu’elles se sentent concernées par le BTP, la construction. Beaucoup de femmes n’osent pas, il faut les encourager et les aider à se lancer.
Avez-vous beaucoup de femmes au sein de votre entreprise ?
Nous avons avec mon mari une entreprise de charpente-couverture-zinguerie-ossature bois et nous sommes deux femmes… dans les bureaux. Je rêverais de voir arriver une candidature de femme, mais cela ne nous est pas encore arrivé depuis vingt-sept ans que je suis dans l’entreprise. Dans notre métier, au-delà du sexe, il faut prendre en compte le travail en hauteur et ne pas avoir le vertige. Ce qui sélectionne déjà pas mal les candidatures, hommes ou femmes. J’espère en accueillir dans l’avenir car la mixité est positive dans une entreprise.
Quelles sont les qualités spécifiques aux femmes dans le BTP ?
Je pense qu’une femme apporte un regard différent. L’entreprise a besoin de ce regard féminin pour moderniser l’image du secteur. Une femme apporte de la sensibilité, de l’écoute, elle peut apaiser une situation. La mixité fait toujours du bien dans une équipe, elle apporte un équilibre.
Comment accueillez-vous personnellement cette présidence d’un groupe si actif ?
Je suis très heureuse d’avoir été nommée présidente du groupe Femmes dirigeantes et j’en suis honorée. Quand je suis entrée dans notre entreprise il y a vingt-sept ans, je ne pensais pas en arriver là, je venais du monde de l’hôpital et je ne connaissais rien au BTP. Après plusieurs formations et avec l’expérience, l’intégration au groupe Femmes m’a fait beaucoup évoluer. Dans ce groupe nous sommes à l’écoute, solidaires, bienveillantes entre nous, sans jamais de jugement. Chacune de nous se retrouve au même niveau, beaucoup de femmes prennent confiance en elles. J’ai beaucoup de projets en tête pour ce mandat et avec Marlène Archimbaud, ma vice-présidente, nous allons former un duo de choc pour mener à bien cette belle mission.