
Forum des métiers du Bâtiment : De l'intelligence traditionnelle à l'intelligence artificielle
Plus de 400 jeunes lycéens et collégiens, une vingtaine de stands de professionnels du BTP et d’organismes de formation, des démonstrations et des ateliers pratiques dont un « espace geek » …
Le premier Forum des Métiers du BTP coorganisé par la fédération BTP Rhône et la CAPEB Rhône le 6 février dernier à Belleville-en-Beaujolais a été un véritable succès. Un succès pour le territoire, puisqu’il a été organisé en réponse à un appel à projets de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, qu’il a mobilisé les services de la Mairie de Belleville-en-Beaujolais et de la Communauté de Communes Saône-Beaujolais, mais surtout parce qu’il a permis aux jeunes élèves des établissements voisins, parfois éloignés des opérations menées sur la métropole lyonnaise, d’avoir eux aussi accès à la promotion des métiers du BTP.
Un succès parce que de nombreux organismes impliqués dans la formation et l’emploi se sont mobilisés : le Rectorat pour sensibiliser les enseignants et les scolaires, Constructys, l’Opco du bâtiment qui accompagne les projets d’apprentissage, et puis France Travail et les Missions Locales qui accompagnent des jeunes en quête de projet professionnel, sans oublier les nombreuses entreprises adhérentes des deux organisations professionnelles.
Un succès enfin, puisque cette « première » qui ne demande qu’à se reproduire dans le temps est le fruit d’une organisation « main dans la main » entre la fédération BTP Rhône et la CAPEB.
Interviews croisées de Marie-Myriam Favre, vice-présidente de la fédération et présidente de la chambre territoriale du Beaujolais, et de Liv-Sonia Pirodon, présidente de la CAPEB Rhône.
Marie Myriam Favre : « Le bâtiment, ce n’est pas seulement construire, c’est bâtir des trajectoires »
Marie-Myriam Favre codirige l’entreprise beaujolaise de charpente et couverture, Chopin Jean-Paul SAS.
Un forum des Métiers dans le Beaujolais, c’est une première ?
C’est une première, comme la co-organisation avec la CAPEB, et j’en suis ravie. Notre filière fait face à des défis majeurs : attirer davantage de jeunes, diversifier nos recrutements, répondre aux grands enjeux de demain comme la transition écologique ou l’intelligence artificielle. Le bâtiment, ce n’est pas seulement construire, c’est bâtir des trajectoires, des réussites personnelles et professionnelles. Et ce forum a pu le prouver. Il faut noter également la forte mobilisation des élus du territoire, de la mairie de Belleville-en-Beaujolais bien sûr, mais aussi des communautés de communes ou d’arrondissement, de la Région Auvergne Rhône-Alpes, des organismes de l’État – le sous-préfet est venu sur place – le Rectorat qui s’est impliqué dans la venue des 400 scolaires, notamment en assurant la gratuité des transports, et puis France Travail, la Mission locale Avenir-jeunes, j’en oublie… Tout le monde a joué le jeu.
Comment ont réagi les jeunes élèves que vous avez croisés ?
Franchement, je les ai trouvés disciplinés et heureux d’être présents. Ils ont pu découvrir de nombreux métiers et filières présents sur leur territoire, voir qu’il existe des entreprises à côté de chez eux qui recrutent, qui peuvent les former en alternance. Pour certains d’entre eux et leurs parents, l’enjeu de proximité est essentiel.

Vous avez le sentiment que l’image de vos métiers du BTP est en train d’évoluer ?
Elle est selon moi de plus en plus positive. Il y a une envie, une volonté de découvrir nos métiers. A titre personnel, dans notre entreprise, nous recevons aujourd’hui des demandes de stage de quatrième ou troisième, ce n’était pas le cas avant. Tant mieux car nos entreprises ont toutes besoin de recruter, même dans une conjoncture un peu difficile, ne serait-ce que pour remplacer celles et ceux qui partent à la retraite.
C’est donc une « première » qui devra engendrer d’autres éditions ?
Ce n’est pas de mon ressort, mais oui, c’était une très belle initiative, un beau projet au cœur du territoire Beaujolais, qui demande à être réitéré, peut-être un an sur deux. Le forum a également été une réussite parce que nous l’avons coorganisé avec la CAPEB dont les adhérents connaissent évidemment les mêmes problématiques de recrutement que nous. L’union fait la force.
Liv-Sonia Pirodon : « L‘image de nos métiers évolue dans le bon sens »
Liv-Sonia Pirodon dirige Illuminance, une entreprise d’Électricité générale et de Conseil en éclairage
Le Forum des Métiers de Belleville a été coorganisé avec la fédération. Ce n’est pas si souvent, pourquoi cette démarche commune ?
Il peut y avoir des divergences entre nos deux organisations au niveau national. Ici il me semble que ces guéguerres n’ont pas lieu d’être. Car nous avons tous un objectif commun : le métier. Nous avons donc décidé de coconstruire le projet, en partageant nos problématiques en termes de recrutement, qui sont d’ailleurs communes à tout l’artisanat en général et pas seulement au Bâtiment. Il nous faut mener des actions pour pallier ces difficultés de recrutement et ce manque d’intérêt des jeunes pour nos métiers. Et plutôt que d’être chacun de son côté, autant le faire ensemble.
Avez-vous le sentiment que l’image du BTP évolue quand même dans le bon sens ?
Oui, j’en suis convaincue. Nous avons beaucoup communiqué, nous avons mené beaucoup d’actions, et puis il y a des événements qui nous ont portés comme les Worldskills à Lyon deux années de suite, où on a vu un très net engouement pour les métiers du bâtiment, ou encore la rénovation de Notre-Dame avec une mise en valeur nationale et internationale de notre savoir-faire. Donc oui, je pense que l’image évolue dans le bon sens, et j’ajoute que l’on voit de plus en plus de femmes nous rejoindre. En tant que femme du Bâtiment je trouve qu’il n’y en a pas encore assez, mais indéniablement l’image change.
Quel a été votre sentiment à l’issue de cette journée de rencontres ?
D’abord j’ai été très agréablement surprise de voir que 400 jeunes élèves se sont déplacés. Ensuite, leur attitude, leur regards émerveillés parfois devant les démonstrations de métiers comme les menuisiers ou carreleurs, leur intérêt, m’ont beaucoup marqué. J’ai discuté avec une bonne trentaine d’entre eux, vraiment contents d’être au forum, qui se posaient des questions sur leur avenir, sans connaître trop le Bâtiment, mais ravis de découvrir les métiers et de constater qu’ils n’étaient pas forcément synonymes de gestes pénibles ou salissants. D’autres, déjà dans un schéma de perspectives sur nos métiers se sont trouvé confortés, bien qu’ils aient 12, 13 ou 14 ans, dans ce qu’ils voulaient faire. Jai trouvé tout cela vraiment sympa et touchant.

Le sujet de ce forum était : « de l’intelligence traditionnelle à l’intelligence artificielle ». Pensez-vous que les artisans sont au rendez-vous de l’intelligence artificielle ?
Tout le monde utilise déjà l’intelligence artificielle, il suffit d’avoir un smartphone. Et l’intelligence artificielle ce n’est pas que ChatGPT. Je vous prends l’exemple d’une entreprise d’électricité, exemple que je connais bien. Nous installons depuis de nombreuses années des systèmes de domotique, dirigés aujourd’hui par la voix ou par un smartphone. Nous sommes déjà ancrés dans l’IA. D’autres métiers utilisent des drones pour l’inspection des chantiers, le calcul des surfaces… L’IA facilite déjà le quotidien pas toujours simple des artisans.
Et c’est une porte d’entrée dans les métiers pour les jeunes ?
Évidemment. Mais l’IA ne remplace pas les mains, c’est juste un outil qui peut nous simplifier la vie et faire évoluer nos métiers, voire déboucher sur de nouveaux métiers dans le BTP. Tous ces sujets montrent que nos métiers évoluent, qu’ils ne sont pas que « physiques », cela peut rassurer des parents parfois peu enclins à laisser leurs enfants se lancer.
À lire dans l’édition du 13 mars 2025 du Journal du BTP
Publications similaires :
- « Nous pourrons compter sur un niveau sans précédent d’investissement de l’ordre de 4,5 milliards », David Kimelfeld
- Face au Covid-19, le BTP appelle à la solidarité économique #surcoutsdechantier #btp
- Pour préserver les emplois, les acteurs de la construction ont besoin de vous
- Il semble que les particuliers retirent de l’épisode covid l’envie d’investir dans leur patrimoine, Thierry Vouillon, Président de la chambre de Charpente Toiture