BTP Rhône lance son propre parcours de formation à la transition écologique. Une première en France

C’est déjà parti ! Ils sont vingt-cinq participants pour dix-sept entreprises du Rhône à s’être lancés dans le parcours Terra BTP Rhône. Terra BTP Rhône ? Un parcours d’éveil inspiré du dispositif de la convention des entreprises pour le climat, « parcours vers le régénératif » concocté par l’Institut CEC et porté par l’ESJDB, qui a la particularité d’être le premier parcours en France de formation en la matière, spécialement conçu pour les entrepreneurs du BTP, avec toutes leurs spécificités, et leur volonté d’être des acteurs de la transition écologique.

Le Rhône est un précurseur, et répond ainsi à l’engagement du président de la Fédération Norbert Fontanel qui avait souhaité dans son plan de mandat « prendre des initiatives sur le développement durable et la transition écologique plutôt que subir »

La première session (sur six) ayant déjà eu lieu, sur deux journées consacrées aux constats scientifiques de l’urgence climatique et ses répercussions sur le monde de demain, c’est l’occasion de faire un premier point d’étape avec Oriane Viguier, vice-présidente à l’Économie et la Prospective, véritable pilote de l’opération, et Frédérick Perron, président d’Axis (Entreprise générale de construction, spécialité gros œuvre, 80 salariés).

Oriane Viguier : « nous voulons savoir avec précision ce qui se passe et ce que nous pouvons faire »

Pourquoi avoir mis en place ce parcours de formation à la transition écologique pour les entrepreneurs de BTP Rhône ?

Il s’agit d’un des trois axes de mandat de Norbert Fontanel que nous avons mis en musique. L’urgence climatique n’échappe plus à personne et les entrepreneurs du BTP sont déjà investis, mais je souhaitais nous donner les moyens de faire mieux, avec comme idée de départ de nous former, nous, artisans et chefs d’entreprise, mais aussi nos collaborateurs. Avec le comité de pilotage, nous nous sommes tournés spontanément vers la Convention des Entreprises pour le Climat et son Institut qui ont déjà fait leurs preuves, et vers l’ESJDB, organisme de formation qui a porté le projet. Nous sommes venus avec nos critères, nos spécificités, et avons convenu de mettre en place un parcours de formation dédié au BTP.

Vous allez « essuyer les plâtres » ?

Nous allons en effet être une promotion « pilote ». C’est la raison pour laquelle j’ai tenu à ce que nous soyons plusieurs membres du bureau à suivre ce parcours afin de l’éprouver et le modifier si nécessaire pour les promotions futures. Le mot clef est le pragmatisme ; nous ne voulions pas d’une formation hors sol. Nous ne souhaitons pas de dogme, d’écologie politique, nous voulons savoir avec précision ce qui se passe et ce que nous pouvons faire. Il y aura d’ailleurs un livrable à la fin du parcours avec une feuille de route par entreprise, mais aussi globale à notre promotion qui traitera de l’ensemble de la filière.

Quel a été le programme de ces deux journées ?

Nous avons commencé par la « Fresque du Climat » sur la base de données scientifiques, qui montre bien l’urgence, l’ampleur et la complexité des enjeux liés aux dérèglements climatiques, avec la montée des eaux, des températures, les sécheresses, et tout ce que cela engendre ou va engendrer comme des déplacements de population, ou des guerres… Le constat est sans appel. Les intervenants, de très haut niveau je tiens à le souligner, nous ont donné des clefs, comme la répartition des responsabilités sur le bilan carbone – 25 % pour le BTP, construction et usages des bâtiments – ou encore ce terrible constat que nous ingérons presque l’équivalent d’une carte bleue en plastique chaque semaine tant les microparticules se baladent partout… Les deux journées ont également été l’occasion de souder le groupe qui se retrouvera au cours de six sessions de formation jusqu’aux feuilles de route, et le partage de l’acquis avec nos équipes.

Vos exemples font froid dans le dos…

Maintenant que l’on sait, on doit agir ! Sans catastrophisme, il nous est juste impossible de laisser à nos enfants une vie sans aucun espoir. Mais nous savons aussi que nous ne pourrons rien faire seuls. Et j’insiste, le but de cette promotion c’est d’inclure nos maitres d’ouvrage, nos fournisseurs, et travailler avec toute la filière.

Ces deux premières journées vous ont rendue optimiste ou au contraire…

Nous sommes les premiers en France à avoir conçu et commencé à suivre un tel parcours. Les autres départements vont se joindre à nous, je suis optimiste, et par la force du nombre, les politiques, maitres d’ouvrage et acteurs du BTP, vont devoir s’impliquer …

Frédérick Perron : « Il y a un avant et un après »

Pourquoi suivez-vous le parcours Terra ?

Je me suis inscrit par conviction personnelle, par responsabilité entrepreneuriale et pour poursuivre la modernisation de la gouvernance de l’entreprise. Et puis ces thématiques et actions répondent à une attente d’un certain nombre de salariés à qui j’ai besoin de proposer un projet, un avenir, avec un virage important à prendre sur notre responsabilité en termes d’écologie. Chez Axis, nous avons déjà formé nos collaborateurs sur la Fresque du Climat, évalué notre bilan carbone, réalisé un diagnostic sur nos 4 FLUX : Energie, eau, déchets et matières premières.

Que dit votre bilan carbone ?

80% de nos émissions sont liées à l’utilisation du béton et de l’acier, à peine 15% pour le fret et le transport. Nous avons déjà établi un plan d’action pour le réduire, en confrontant les propositions des salariés formulées après l’atelier « Fresque du Climat », et celles découlant des résultats de notre Bilan Carbone et diagnostic ECO-FLUX.

Que peut-on trouver dans votre plan d’action ?

Notre plan d’action a été bâti autour de cinq axes : choix de nos activités, immobilisations et siège, matières premières et fournitures, déplacement/transport de nos salariés et le fret.

Nous essayons par exemple d’avoir des critères de sélection dans les appels d’offres, nous essayons aussi d’embarquer avec nous maitrise d’ouvrage et maitrise d’œuvre pour nous orienter vers des solutions plus neutres en émission carbone. Dans nos pratiques au quotidien, nous nous efforçons d’être plus vertueux au siège et sur nos opérations en réduisant nos consommations, en adoptant des comportements responsables. Dans le choix de nos partenaires, il s’agit de privilégier le local et des entreprises engagées. Nous allons également mettre en place des mécanismes pour privilégier les transports en commun, favoriser le covoiturage via une application, renforcer le télétravail pour les sédentaires… Nous sommes en phase d’étude sur la transition de notre parc automobile qui aura lieu sur trois ans. Ce plan est étalé dans le temps et sera forcément adaptatif. L’important étant qu’il émane d’actions soutenues par les salariés.

Qu’avez-vous pensé de ces deux journées de parcours ?

Il y a un avant et un après. C’est un constat, on repart forcément plein d’interrogations et avec une vraie prise de conscience, même si on se sent un peu démuni voire fataliste en sortant de cette première session. Il est donc important de partager ce parcours avec d’autres acteurs de la profession, car cela permet de ne pas être seul face à cette urgence. J’attends beaucoup de la suite et des solutions qui vont émerger du collectif.

A lire dans l’édition du Journal du BTP du 7 décembre 2023